30 ans,
30 portraits

Kemmel Rezkallah

Kemmel Rezkallah

Moniteur d’Atelier

« OASIS est un tremplin nécessaire pour les personnes qui ont eu des accidents de la vie »

Kemmel, 55 ans, a connu plus d’une vie professionnelle. De la restauration, au bâtiment, en passant par la logistique et l’industrie automobile, ce père de famille a toujours travaillé de ses mains. Mais le travail a épuisé son corps. Depuis 2014, Kemmel est reconnu en tant que travailleur handicapé. Grâce au dispositif OASIS lancé en 2013 pour favoriser l’insertion dans l’emploi des travailleurs en situation de handicap, Kemmel a pu se préparer au métier de moniteur d’atelier dans le secteur médico-social.

Originaire du Pas-de-Calais, Kemmel a 18 ans lorsqu’il quitte le domicile familial. Obligé de travailler pour gagner sa vie, le jeune homme devient serrurier, puis plaquiste dans le bâtiment. Il se forme à la comptabilité, exerce dans ce domaine un moment, « pour faire plaisir aux parents » mais revient rapidement aux métiers manuels, car ce qu’il préfère c’est « travailler avec [ses] mains ». Il change de voie et rejoint la restauration. La trentaine bien entamée, il devient cariste dans l’industrie automobile. Pendant 10 ans, Kemmel gère les stocks entrants et sortants des chaînes de production de voiture, six jours sur sept, en intérim. Mais plus les années passent, plus son dos le fait souffrir. Les lumbagos s’enchaînent, tout comme les arrêts de travail. Mais Kemmel, père célibataire, doit continuer à travailler pour faire vivre ses trois enfants. Jusqu’à la paralysie. Le diagnostic tombe : Kemmel souffre d’une hernie discale. « Mon dos a subi ce qui arrive souvent aux chauffeurs et aux caristes lorsqu’on manipule différents engins. »

Entre 2010 et 2012, Kemmel ne peut plus travailler. La nuit, il dort à même le sol sur un tatami pour atténuer la douleur. Il tombe en dépression. « Je ne me rendais pas compte que j’étais devenu un travailleur handicapé, c’est mon médecin qui m’a parlé de la RQTH. » Il l’obtient en 2014. « Quand je me suis remis debout, il fallait que je retravaille. » Pôle emploi l’oriente vers Cap emploi. Kemmel sait faire beaucoup de choses. Pourquoi ne pas transmettre ses compétences en devenant moniteur d’atelier auprès de publics fragilisés ? Pour qu’il y parvienne, on lui propose d’intégrer le dispositif OASIS, une préformation destinée à favoriser l’accès des personnes en situation de handicap aux métiers du sanitaire et social.  Kemmel intègre le programme OASIS à la fin de l’année 2019.

Dans cette promotion, Kemmel rencontre d’autres personnes en situation de handicap. « Au début de la formation, on était tous là comme des canards boiteux. On s’apitoyait sur notre sort. On a beaucoup ri mais aussi pleuré. » Pendant quatre mois, la promotion alterne cours théoriques et stages en immersion pour préciser le projet professionnel de chacun et se familiariser avec le métier choisi. Kemmel intègre un ESAT de la région pour une mise en situation de quinze jours en tant que moniteur d’atelier cuisine. « Le métier consistait à animer et entourer les bénéficiaires handicapés de l’ESAT pour qu’ils acquièrent des compétences en cuisine. » Kemmel est dans son élément et se sent utile. « OASIS fait ressortir tous les liens qu’on peut avoir avec le social. On a tous en nous une part d’empathie. OASIS nous permet de nous révéler, de prendre conscience de ce qu’on est capable de faire. »

Au fil des semaines, Kemmel et ses camarades de promotion reprennent confiance en eux. « À la fin de la prépa, plus personne ne〝 boitait 〞», s’amuse Kemmel comme pour souligner le chemin parcouru par le groupe. À l’issue de la préformation OASIS, Kemmel intègre une formation initiale universitaire d’un an en alternance à Loos, au sein de l’Institut Régional du Travail Social (IRTS) des Hauts-de-France. Son alternance se poursuit au sein d’un ESAT.  « On élaborait plus de 200 repas par jour comme une vraie brigade. On était au top. J’étais là pour surveiller l’ensemble, vérifier que les manipulations se déroulait en toute sécurité et que tout le monde prenait du plaisir dans le travail. C’est un travail exigeant. » Kemmel obtient son diplôme de moniteur d’atelier en juin 2021 et poursuit sa mission en CDD au sein de la structure jusqu’en septembre.

Depuis quelques semaines, Kemmel prépare son départ vers le pays basque pour changer d’air. Il cherche donc activement un poste de moniteur d’atelier près de la mer. « Je suis confiant, je crois en ma bonne étoile. OASIS est un tremplin nécessaire pour les personnes qui ont eu des accidents de la vie. Sans cette préformation ça n’aurait pas été possible pour moi d’en arriver là. Aujourd’hui je me sens libéré et je ne me vois pas faire autre chose que d’aider les autres. »

Infos complémentaires :

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